Il était une fois un curé de campagne bossu et pervers qui engrossait
régulièrement ses ouailles. L'abbé Perrin était une "nature", comme on dit. Son
caractère était bien trempé, bien que son corps fût contrefait. Il aimait la
bonne chère. Et surtout les femmes, à peu près toutes les femelles. Mais aussi
le pinard, du plus aigre au plus choisi. Et encore les jeux de hasard, du plus
minable au plus dispendieux. Et même disait la rumeur, les bordels les plus mal
famés... Bref, le père Perrin était un vrai débauché, un digne disciple de
Casanova.
Souvent il revenait de ses excursions douteuses tard le soir, parfaitement
ivre. Sa jeune bonniche en payait généralement les frais, elle qui était belle
et vertueuse comme une Vierge Sainte. Il la troussait sur-le-champ pour la
saillir sur le pas de la porte du presbytère sans autre forme de procès. Il
était fréquent que des passants vissent les ébats éhontés du prêtre qui ne se
cachait d'ailleurs nullement. Il semblait même être particulièrement fier de ses
publiques et acrobatiques prouesses... Le dévot était un authentique paillard,
on devait au moins lui reconnaître cette qualité.
Ce drôle de pieux au dos courbé rendait toujours visite à ses plus
flatteuses protégées après la célébration du dimanche. Sans doute les vertus
toniques du vin de messe que l'officiant absorbait avec une piété toute
chrétienne... C'est que l'ecclésiastique pratiquait avec un rare scrupule la
charité sur sa propre personne. Il avait au moins le sens de lui-même, à défaut
d'avoir le soin de l'autre. Les plus laides de ses ouailles quant à elles se
faisaient culbuter directement à confesse. Le religieux était esthète : il se
réservait les plus jolis morceaux pour les grandes occasions. Pâques, Noël,
noces, enterrements...
Aux funérailles il consolait les adorables éplorées. Aux mariages il
exerçait son droit de cuissage sur les épousées, les déflorant au passage s'il
avait omis de le faire au temps de leur communion, soit pour raison de décence à
cause de leur puérilité, soit pour raison de goût, préférant les charnelles aux
fluettes. Le ministre du culte avait une solide morale. Aux jours des fêtes, il
besognait volontiers les Marquises, les Comtesses et quelques châtelaines. C'est
qu'il avait du goût, le confesseur de ces dames !
A sa mort on sonna le glas dans toute la contrée : il avait tant essaimé,
tant forcé de passages secrets que nulle pécheresse ne pouvait ne pas
revendiquer avoir reçu au moins une fois l'hommage de son fécond bâton de
pèlerin, pour certaines dans le temple interdit, pour d'autres dans le vase
naturel selon qu'elles furent délicieuses ou repoussantes.
On peut dire qu'il avait vraiment la bosse dure, le calotin.
Raphaël Zacharie de IZARRA
Et je rends cependant un juste hommage à ces précepteurs qui m'édifièrent dans la rectitude chrétienne, la noblesse d'âme et la hauteur d'esprit. Ce qui ne m'interdit pas, par ailleurs, de les mettre en scène dans mes souvenirs (vagues ou précis) à travers mon plus féroce humour... Non dénué de tendresse.
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